8. « Le nom que je lui donne de Chenin noir » …

Dans la Loire, on emploie souvent le nom de Chenin Noir pour dénommer le Pineau d’Aunis. Ce synonyme, chez ses utilisateurs, fait référence à la fois à une connaissance intime du vignoble et à la tradition.

Dans un  jeu de miroirs, c’est l’exact symétrique inversé de l’usage de  « Pineau de Loire » pour « Chenin » (blanc). Ces deux dénominations surannées font référence aux mêmes ressorts  d’intimité et de mémoire.

A ma connaissance, le cépage apparaît dans les sources au tout début du 19e siècle sous les noms d’Onis, Ony, en Indre et-Loire en 1808, de Pineau d’Aunis en 1809 dans la Loire atlantique, et d’Aunis chez André Jullien en 1816 (Indre-et-Loire).
En 1845, Odart dans son Traité des cépages (1ère édition), le nomme le Pineau Douis. Il faut voir là une faute typographique, un u pour un n, et restituer Pineau Donis.

Le même Odart, en 1854 (3e édition, p. 147), dans sa volonté de créer une « tribu »  des pinots de Loire équivalente à celle des pinots de Bourgogne, dont il adopte l’orthographe -ot, ouvre la nouvelle tradition en forgeant un nom de cépage savant, qui rompt avec la pratique vigneronne  :

 « … Il existe un autre [pinot] qui me semble bien préférable ; et c’est bien véritablement le

CHENIN NOIR : aussi l’ai-je reçu sous le nom de

PINOT D’AUNIS. Je désire donc qu’on adopte le nom que je lui donne de Chenin noir ; car il  est manifestement une variété [de pinot de Loire] : même feuillage, même forme de grappe et de grains, même fertilité, mais un peu plus de facilité à mûrir [que le blanc] ; de même pas la moindre communauté de caractère avec les Pinots de Bourgogne. […] Il est cultivé en grand et presque exclusivement dans quelques vignobles du Loir-et-Cher, notamment à Trôo, commune dont les vins sont les plus estimés de ce département. »

Ensuite, l’effort d’éclaircissement des ampélographes du 19e siècle pour supprimer les associations, les doublons et les synonymies trompeuses (Bouchard, Pulliat, Viala et Vermorel …) conduisit au moins momentanément (1850-1900) à l’adoption de Chenin en lieu et place de Pinot/Pineau.

Deux raisons permirent ensuite de revenir à Pineau d’Aunis au 20e siècle :
– La distinction orthographique Pinot = Bourgogne, Pineau = Loire ;
– L’absence de parenté entre chenin noir et chenin blanc.
En revanche, en blanc, Chenin détrôna Pineau …

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8. « Le nom que je lui donne de Chenin noir » …

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